Le saviez-vous ? Le halal est l’enfant du néoliberalisme et du fondamentalisme

Saviez-vous que, selon l’anthropologue Florence Bergeaud-Blackler, auteur de « Le Marché halal ou l’invention d’une tradition », le halal est né industriel, fruit du néolibéralisme et du fondamentalisme ?

Référence : Florence Bergeaud-Blackler : « Le halal est né industriel, fruit du néolibéralisme et du fondamentalisme », par Sonya Faure et Maryam El Hamouchi, 2017-01-05.

Quelques citations :

[…] l’apparition de ces produits « licites » est récente et sert les intérêts des industriels et des franges rigoristes de l’islam. Un « vent mauvais » pour la démocratie, estime la chercheuse.

[…] l’alliance entre néolibéralisme et fondamentalisme religieux a accouché d’un marché inquiétant : le halal s’étend sans cesse et devient un moyen de contrôle des comportements des consommateurs.

Halal signifie « licite » ou « permis » en arabe, c’est l’antonyme de haram, illicite. L’usage théologique du mot désigne la liberté du permis, ce que le musulman peut faire. Mais le marché a transformé le sens du halal, en définissant halal comme le prescrit, pour être un « bon » musulman. Il n’existe pas de norme halal. […]

Je parle d’invention du « marché halal » dans le sens où l’on n’a pas affaire à une coutume ancienne importée des pays musulmans. Ce marché n’a jamais existé dans le monde musulman avant que les industriels ne l’y exportent. La convention du halal naît au tournant des années 70-80. Deux idéologies triomphent sur la scène internationale : d’un côté, le fondamentalisme musulman, avec notamment la proclamation de la République islamique d’Iran en 1979, et, de l’autre, le néolibéralisme, avec Thatcher et Reagan. […]

Ce que j’appelle l’espace alimentaire musulman a longtemps été marqué par le seul interdit du porc. L’abattage rituel était surtout pratiqué lors des cérémonies. Les boucheries islamiques se sont développées assez tardivement à la suite de la réislamisation des années 80. L’offre de halal va rencontrer la demande de la diaspora, pour laquelle la cuisine est une façon de protéger l’intégrité de sa culture, et la stratégie des groupes fondamentalistes qui voient bien que la clôture alimentaire peut aussi être une clôture communautaire. […]

Le fondamentalisme se caractérise par un rapport littéral aux textes et par le fait qu’il se définit comme l’orthodoxie : toutes les autres formes religieuses sont pour lui des déviances. C’est cette logique qui a permis à la convention halal d’exister : l’idée qu’il n’existe qu’une seule façon d’abattre un animal. Dès le départ, cette pratique est donc une idée fondamentaliste, qui va devenir, dans son développement ultérieur, quasi totalitaire : elle doit gouverner l’ensemble de la vie du croyant. […]

Les deux marchés [halal et casher] ne sont pas comparables. La casherout est née il y a plusieurs siècles, avant l’industrialisation. La séparation entre fonctions marchande et religieuse est instituée, même si elle peut être transgressée, et elle a fonctionné pendant des siècles. Le marché halal, lui, est né industriel, fruit du néolibéralisme et du fondamentalisme, il n’y a pas de séparation claire. […]


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