Blogue 135 : Quatre mythes de la Loi 21

David Rand

2022-01-23

Voici quatre faussetés que nous entendons couramment au sujet de la Loi 21. Le mot « mythes » dans le titre est peut-être trop faible — il faudrait plutôt écrire « mensonges » — car les opposants à cette Loi les véhiculent allègrement.


[1] La Loi 21 est discriminatoire.

 FAUX 

J’ai déjà réfuté ce mythe dans un blogue précédent, La Loi 21 est-elle discriminatoire ?. Pour résumer, j’ajoute ceci :

J’ai entendu dire que la plupart des conducteurs qui reçoivent des contraventions pour excès de vitesse ont moins de 30 ans. Si tel est le cas, cela signifie-t-il que les limitations de vitesse sont discriminatoires en fonction de l’âge ? Non. Il se trouve que certains groupes d’âge ont tendance à faire des excès de vitesse plus que d’autres.

Il en est de même pour la Loi 21. Elle ne discrimine ni sur la base de la religion, ni sur le sexe. Mais les adhérents de certaines religions ou mouvements religieux sont plus susceptibles d’enfreindre la loi parce que ces mouvements prônent agressivement le port de signes religieux par l’un ou l’autre sexe. En particulier l’Islam, surtout sa variante politique, est extrêmement misogyne et fait une promotion agressive du voile. Ce sont les religions qui discriminent, pas la Loi 21.

La Loi 21, c’est comme les limitations de vitesse ou les lois anti-tabac. Celles-ci ne discriminent pas les gens. Au contraire, ils restreignent certains comportements. Les fumeurs ne sont pas exclus des restaurants et des bars, mais chacun doit s’abstenir de fumer sur place et sortir si on veut fumer.


[2] La Loi 21 nie aux croyants religieux des droits dont jouissent les athées.

 FAUX 

Le port d’un symbole athée ostentatoire peut déjà être contraire à la Loi sur la fonction publique (articles 10, 11, 12). Je ne suis pas juriste, je peux donc me tromper, mais un tel symbole pourrait très bien être considéré comme politique. Le symbole serait également interdit en vertu de la Loi 21. Bien sûr, l’athéisme n’est pas une religion, mais c’est une opinion sur la religion, donc un symbole athée pourrait être considéré comme un symbole religieux dans ce sens.

Ce que fait en réalité la Loi 21, c’est supprimer un privilège : c’est-à-dire qu’avant son adoption, les symboles politiques étaient interdits, mais pas les signes religieux. La Loi 21 uniformise les règles du jeu. Avant la Loi 21, les croyants bénéficiaient d’un privilège qui était refusé aux athées. Cependant, la Loi 21 ne va toujours pas assez loin : l’interdiction des signes religieux doit être étendue à l’ensemble des travailleurs de la fonction publique, comme le fait déjà la Loi sur la fonction publique pour les symboles politiques.


[3] La Loi 21 viole la Charte canadienne des droits et libertés.

 INCERTAIN 

Une contestation devant les tribunaux est en cours afin de déterminer si la Loi 21 est compatible ou non avec la Charte. Ce processus n’est pas encore terminé et ne le sera pas tant que la Cour suprême du Canada ne se sera pas prononcée. De plus, les quatre décisions rendues jusqu’à ce jour ont toutes maintenu la Loi 21 en vigueur. Ces décisions sont :

Dans la plus importante des ces quatre décisions, le juge Blanchard a invalidé deux stipulations de la Loi (l’interdiction des couvre-visage à l’Assemblée nationale et l’application de la Loi aux écoles anglophones) tout en maintenant le reste de cette Loi. Toutefois, les raisons qu’il a invoquées pour justifier ces deux exceptions sont extrêmement douteuses ; il y a donc de fortes chances qu’elles soient renversées lors de l’appel. Quoi qu’il en soit, la contestation de la Loi 21 n’est pas encore complétée. Il est donc prématuré de déclarer définitivement que la Loi 21 serait compatible ou non avec la Charte. Il faut attendre.

Les opposants de la Loi 21 se plaignent bruyamment de l’utilisation de la clause nonobstant pour renforcer cette Loi. Eh bien, sachez qu’il s’agit de la clause 33(1) de la Charte. Elle fait partie de la Charte et est donc compatible avec celle-ci. D’ailleurs, il s’agit d’une disposition qui aide à protéger la démocratie car elle constitue une protection contre la tyrannie des juges qui sont nommés pour la vie (et nommés par le gouvernement fédéral en plus) tandis que les députés qui adoptent les lois sont élus par le peuple pour un temps limité et peuvent être remplacés.


[4] La Loi 21 viole la Déclaration universelle des droits de l’homme de l’ONU.

 FAUX 

Considérons les articles suivant de cette déclaration :

  • Article 18 : Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites.
  • Article 29.2 : Dans l’exercice de ses droits et dans la jouissance de ses libertés, chacun n’est soumis qu’aux limitations établies par la loi exclusivement en vue d’assurer la reconnaissance et le respect des droits et libertés d’autrui et afin de satisfaire aux justes exigences de la morale, de l’ordre public et du bien-être général dans une société démocratique.

Notez que l’Article 18 parle du droit de manifester sa religion « tant en public qu’en privé » mais ne mentionne pas le lieu de travail. Notez aussi que l’Article 29.2 stipule que les droits et libertés peuvent être limités afin « d’assurer la reconnaissance et le respect des droits et libertés d’autrui ». Voilà précisément ce que fait la Loi 21 : elle applique une limitation sur la liberté de pratique religieuse (mais aucune limite sur la croyance religieuse) des fonctionnaires en position d’autorité, y compris les enseignant(e)s, afin de protéger la liberté de conscience des usagers de services civils et des élèves dans les écoles.


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