Blogue 105 : Bravo, Monsieur Legault !

David Rand

2019-02-07

Récemment, l’idée de faire du 29 janvier une journée officielle contre la soi-disant « islamophobie » est revenue sur la table. Proposée l’année dernière par la Conseil national des musulmans canadiens (CNMC), à l’époque du premier anniversaire de l’attentat contre la mosquée à Québec, cette proposition n’a heureusement pas été retenue. Cette année, avec le deuxième anniversaire, les partisans de cette idée sont revenus à la charge.

La réponse du premier ministre du Québec, François Legault, a été rapide et définitive : c’est non ! Pas de journée contre l’islamophobie. Seulement deux jours après la date de commémoration, il a même déclaré qu’« il n’y a pas d’islamophobie » au Québec. Sans surprise, cette déclaration n’a pas plu a certaines personnes. Le CNMC a exigé que Legault se rétracte, tandis que Boufeldja Benabdallah de la Grande Mosquée de Québec a dit se sentir « trahi » par les propos de Legault.

Au lendemain de cette déclaration, Legault a légèrement modifié son propos, concédant que oui, il y a de l’islamophobie au Québec, mais pas de courant islamophobe, et il a ajouté que « Nous continuerons d’honorer la mémoire des 6 victimes de la tragédie de la mosquée de Québec, chaque 29 janvier. C’est un devoir de mémoire important. » Mais il n’a pas retracté son refus d’une journée contre l’« islamophobie ».

L’ex-députée Fatima Houda-Pepin abonde dans le même sens :

Honorer la mémoire des victimes est un devoir de mémoire. Instrumentaliser leur mort pour réclamer que le 29 janvier soit déclaré Journée nationale contre l’islamophobie est un « agenda » politique.

À mon avis, Monsieur Legault a fait preuve d’un courage exemplaire en rejetant clairement et fermement cette très mauvaise idée. Il y a une pression énorme sur lui, essayant de le faire reculer et il a, jusqu’au moment où j’écris ces lignes, résisté avec aplomb et résolution.

Nous, chez Libres penseurs athées, avons depuis longtemps dénoncé l’usage de ce terme déloyal « islamophobie » et rejeté l’idée d’une journée commémorative à ce titre. Il y a un an, j’ai signé un blogue expliquant mon opposition à cette idée. Vous trouverez sur notre site plusieurs autres textes à ce sujet : il suffit de saisir ce mot dans la boîte de recherche.

Au fait, le premier ministre Legault avait raison de dire que l’islamophobie n’existe pas au Québec pour la raison simple et évidente qu’elle n’existe nullepart. Il suffit de se pencher sur le vrai sens de ce terme pour se rendre compte qu’il est incohérent. Le suffixe « phobie » implique une peur irrationnelle, mais avoir peur de l’islam ou de toute autre religion n’est pas du tout irrationnel. Au contraire, c’est de la prudence élémentaire.

Lorsque nous considérons les dogmes des religions, et de l’islam en particulier, il y a vraiment de quoi avoir peur. Prenons un seul exemple : l’apostasie, c’est-à-dire l’abandon d’une religion. L’apostasie est formellement interdite en islam, cela fait partie de la doctrine ordinaire (et pas du tout exceptionnelle) de cette religion, et elle est criminalisée dans plusieurs pays à majorité musulmane, punie parfois par la peine de mort ! Notons en passant, que selon un sondage important du Pew Forum, des millions de musulmans, sinon des dizaines de millions, se disent d’accord avec cette peine de mort pour apostasie. On serait fou de ne pas avoir peur d’une telle religion.

Gazouillis d'Ensaf Haidar

Au fond, les accusations d’« islamophobie » ont un but évident : étouffer la nécessaire critique de l’islam ou de l’islamisme. Selon Ensaf Haider, épouse de Raif Badawi qui est toujours incarcéré en Arabie saoudite,
« L’islamophobie est une création des islamistes en Occident pour intimider et faire taire les personnes qui disent la vérité sur la charia. »

Au delà de ces considérations, cette idée d’une journée contre l’islamophobie soulève une foule d’autres problèmes. Elle représenterait un privilège accordé à une religion en particulier, au détriment des autres et surtout au détriment de l’incroyance. Un seul exemple : l’athéophobie est un phénomène réel et les monothéismes, y compris l’islam, en font la promotion, mais personne (même pas nous) n’a proposé une journée contre l’athéophobie. D’ailleurs, les idées ne méritent pas de protection particulière ; ce sont plutôt les êtres humains qui la méritent.

Les partisans de l’islam politique ont déjà trop instrumentalisé cet affreux attentat du 29 janvier 2017 pour promouvoir leur programme. Ils ont réussi à faire adopter par le parlement canadien une motion (la M-103) qui non seulement dénonce la soi-disant islamophobie mais qui mélange allégrement race et religion, semant la confusion entre les deux et permettant aux islamistes de faire de fausses accusations de racisme contre leurs critiques. Ils ont essayé de stigmatiser et de culpabiliser l’ensemble des Québécois pour le geste meutrier d’un seul individu tourmenté. Cela ressemble à de la propagande haineuse contre les Québécois, les dénigrant tous comme une bande d’affreux racistes.

Alors, c’est dans ce contexte de propagande écrasante que la détermination de François Legault prend tout son sens. Espérons qu’il va tenir bon dans les mois à venir. Il lui faudra du courage pour mener à bien les mesures laïques que son gouvernement nous a promises. À ce sujet, une autre raison d’être optimiste : Legault a récemment remarqué que son parti a fait preuve de « compromis » en restreignant l’interdiction du port de signes religieux aux fonctionnaires en position d’autorité et non pas à tous. Cela implique qu’il reconnaît que cette interdiction devrait en principe s’appliquer à toute la fonction publique. Il possède donc une compréhension des limites du programme actuel de son parti et de l’éventualité de le compléter à l’avenir.

Espérons qu’il aura le courage de refuser aussi l’idée d’une clause grand-père qui accorderait une exemption aux fonctionnaires en poste avant la mise en vigueur de cette interdiction, créant ainsi des inégalités et des situations ingérables comme le souligne André Lamoureux, porte-parole du Rassemblement pour la laïcité.


Un commentaire sur “Blogue 105 : Bravo, Monsieur Legault !
  1. Réal Boivin dit :

    Une clause grand père pourrait être introduite dans le projet de loi MAIS avec une durée dans le temps (deux ans) ce qui permettrait aux récalcitrantes de se trouver un emploi ailleurs.

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